Père Oleg, comment voulez-vous que nous vous présentions à nos lecteurs ? Parlez-nous de vous.
Tout d'abord, je suis un serviteur de Dieu, un membre de la communauté du monastère et du clergé. Je suis également un scientifique et j'ai l'habitude de regarder beaucoup de choses dans notre monde à travers le prisme de la science. J'ai suivi un programme de troisième cycle, travaillé dans un institut de recherche et soutenu une thèse.
Je suis également un enseignant. J'enseigne la physique aux élèves de notre école, Ichthus. Je dirige des cours de technologies de l'information à l'université et j'enseigne aux professeurs d'école dans le cadre d'un programme de développement professionnel. Je n'avais jamais prévu de devenir enseignant, mais j'ai fini par beaucoup aimer ce travail.
Je suis un père de famille et avec ma femme, nous construisons notre église domestique. Ma mère est une sœur de charité dans notre communauté laïque. Tout cela est important et remplit notre vie.
Selon vous, comment la plupart des gens trouvent-ils Dieu de nos jours, et comment cela vous est-il arrivé ?
Malheureusement, la plupart des gens viennent à Dieu lorsqu'ils sont dans le chagrin. Mais sur mon chemin vers Dieu, je n'ai jamais cessé de remercier le Seigneur. Être reconnaissant envers Dieu me permet de partager la joie de ma foi avec les autres.
Plus nous remercions Dieu, plus notre foi se renforce. Les saints pères ont toujours remercié Dieu pour leurs difficultés, leurs peines et leurs privations. Mais à la lecture de leur vie, beaucoup de gens ont aujourd'hui du mal à y croire. Ils ne peuvent pas imaginer remercier quelqu'un pour leurs difficultés. Mais j'ai découvert que lorsque nous venons à Dieu avec de la gratitude et un cœur contrit, Il nous révèle la sagesse de Sa providence. Il transforme nos tragédies en bénédictions et nos échecs en réussites. Il nous protège contre de multiples tentations et nous rend plus forts. Ainsi, même si notre rencontre avec Dieu se fait dans la douleur et la souffrance, nous devons être reconnaissants. Souvent, ce qui ressemble à une perte et à une tragédie au début devient une victoire et une bénédiction des années plus tard. J'ai vu cela se produire à plusieurs reprises.
Quel était votre chemin vers l'ordination ?
J'ai été baptisé dans ma petite enfance, à l'âge de deux ou trois ans. Ma progression vers Dieu a été lente mais régulière. Je ne me souviens pas d'un tournant ou d'une crise majeure en cours de route. C'est à la fin de la neuvième année d'école que j'ai découvert la puissance de la prière ‒ et je n'allais même pas à l'église à l'époque. J'entrais dans un programme de préparation universitaire très compétitif et j'ai dit la prière "Notre Père" pendant toute la période des examens. Elle venait de mon cœur. Mes concurrents étaient bien préparés, mais j'ai quand même été admis.
À dix-neuf ans, j'ai commencé à assister aux entretiens du père André Léméchonok avec les paroissiens de la cathédrale des Saints Pierre et Paul et ensuite aux offices au monastère Sainte-Élisabeth. Un an plus tard, j'ai rejoint les sœurs laïques du monastère lors de leurs visites à l'établissement de soins de longue durée pour enfants handicapés. En aidant les autres, j'ai appris à les écouter et à répondre à leurs besoins.
Après neuf ans de bénévolat à l'école du dimanche et dans plusieurs ateliers monastiques, j'ai rejoint le département des relations extérieures du monastère. C'est une mission importante de visiter différents pays et de parler aux gens de la foi orthodoxe.
Je suis maintenant un prêtre moi-même mais je n'ai pas cessé d'apprendre des autres prêtres. Je regarde, j'écoute et je fais des découvertes en permanence. Mon ordination m'a rendu plus indulgent et moins critique.
Est-ce la famille qui a influencé votre choix?
Dans notre croissance personnelle et spirituelle, les traditions familiales jouent un rôle prépondérant. Nous avons toujours aimé la lecture et nous avons célébré nos fêtes ensemble. Au début, il s'agissait de fêtes comme le Nouvel An, le jour de la Victoire ou les anniversaires. Par la suite, ma mère a rejoint la communauté de soeurs laїques du monastère Sainte-Élisabeth. Toute notre famille est rapidement devenue pratiquante. De toutes les fêtes séculaires, seul le jour de la Victoire est resté dans notre calendrier.
Il y a quelques années, le monastère Sainte-Élisabeth a instauré la tradition de célébrer une liturgie de nuit pour le Nouvel An. J'ai participé à cette liturgie en tant qu’un assistant d'autel. Aujourd'hui, notre année commence par une liturgie de nuit et la Sainte Communion le matin. Je trouve cela profondément rassurant et inspirant.
Avec ma femme, nous travaillons dur pour construire notre église domestique. Ma femme est peintre d'icônes. Nous lisons ensemble des textes religieux. Nous lisons souvent l'Évangile, par exemple. Nous sommes mariés depuis environ trois ans. Notre mariage à l'église a eu lieu en 2018, le jour de la fête de l'icône de la Mère de Dieu de Kazan.
Ma famille a des racines biélorusses, ukrainiennes et russes. J'ai grandi en parlant ukrainien. Mes parents viennent de Seredina Buda, une petite ville de la région ukrainienne de Sumy, à la frontière avec la Russie. Mon père était allé dans un collège technique à Kharkov. Ma mère a suivi une formation d'ingénieur à Minsk et a commencé sa carrière dans cette ville. Je n'ai jamais ressenti de divisions entre les Russes, les Biélorusses et les Ukrainiens. Je suis profondément attristé par la situation actuelle.
Je suis reconnaissant à mes parents d'être restés ensemble malgré toutes les épreuves. Ils ont travaillé dur pour maintenir leur mariage. Mon père a été diagnostiqué avec un cancer avancé et est parti prématurément en 2017. Malgré sa maladie, il n'a jamais exigé de traitement spécial. Au contraire, il a présenté un modèle de compassion et d'amour pour ses proches jusqu'à ses derniers jours. Il a toujours pris soin d’eux. Il était toujours doux et cordial, même lorsqu'il donnait ses dernières instructions.
Quelles autres personnes dans votre vie vous ont aidé à progresser en tant que chrétien et prêtre orthodoxe?
J'ai toujours été inspiré par les écrits du métropolite Antoine de Souroge (Bloom) et j'ai eu la chance de le rencontrer personnellement. Après ma troisième année d'université, j'avais demandé un visa américain dans le cadre du programme "Work and Study" mais l'ambassade avait rejeté ma demande. J'avais donc accepté l'offre d'aller plutôt à Londres. Avant mon départ, je m’étais renseigné sur l'église de la Dormition de la Très Sainte Mère de Dieu et de Tous les Saints où officiait le métropolite Antoine de Souroge. J'avais également appris l'existence du monastère fondé par le père Sophrony (Sakharov) près de Londres.
Lorsque j'ai rencontré le métropolite Antoine, j'ai été très impressionné par sa remarquable profondeur et sa beauté intérieure. Il prononçait ses homélies en russe puis les répétait en anglais, mot pour mot. Je n'arrivais pas à comprendre comment il pouvait répéter l'ensemble du texte dans ses moindres détails. Ses sermons étaient profonds, bien structurés et allaient toujours droit au but.
Ses entretiens avec ses paroissiens étaient remarquables. C'était un grand honneur et une merveilleuse expérience d'être membre de cette paroisse. Je restais après les liturgies pour aider, je participais au nettoyage de l'église tous les lundis en tant que bénévole.
C'est en faisant du bénévolat que j'ai rencontré le père Joseph, un diacre ordonné prêtre par la suite. Le père Joseph m'a confié le travail au bureau de la paroisse. J'ai travaillé avec ses archives, j'ai scanné et numérisé les anciens bulletins paroissiaux, dont chacun contenait les homélies du métropolite Antoine et de nombreux autres textes intéressants. J'ai numérisé et lu des centaines de pages. Ce travail a été une bénédiction de Dieu.
Pendant mon séjour en Angleterre, j'ai visité le monastère du Père Sophrony où je me suis trouvé un père spirituel, l'archimandrite Syméon. Le père Syméon est parti vers Dieu en 2009. Je suis retourné au monastère des années plus tard, à l'invitation du Père Nicholas, petit-neveu du Père Sophrony, pour l'aider dans son travail sur les archives. Sur recommandation du Père Nicholas, je suis devenu un disciple spirituel de l'archimandrite Zacharias.
Ici, à Minsk, mon père spirituel est le père André Léméchonok. Il a marié mes parents en 1999. En 2000, il m'a donné sa bénédiction pour visiter les enfants en soins de longue durée et, à partir de 2009, pour travailler au département des relations extérieures du monastère. En 2012, il m'a donné sa bénédiction pour étudier au séminaire et nous a marié, ma femme et moi, en 2020. Avec sa bénédiction, je suis devenu diacre en 2020 et quatre mois plus tard, prêtre. Je profite de chaque occasion pour me confesser à lui et demander son avis avant de faire des choix importants.
L'athéisme est courant chez les scientifiques. Votre foi interfère-t-elle avec votre travail scientifique ?
La foi en Dieu n'est jamais un obstacle à la science, j'en suis sûr. Parmi les scientifiques, les mathématiciens sont le plus souvent croyants. Il n'y a pas si longtemps, j'ai lu cette information. Il y a beaucoup de miracles en mathématiques, d'étonnantes régularités dans les nombres. Les mathématiciens sont les moins dépendants de leur environnement et des financements pour leur travail scientifique ‒ un crayon, une règle, ils n’ont besoin de rien d'autre pour travailler.
En physique ou en biologie, c'est différent. Les chercheurs ont besoin d'équipement et de matériel pour leurs expériences et leurs observations. Cela les rend plus dépendant et souvent influencés. Un autre obstacle à la perception de la présence de Dieu est notre esprit ambitieux. Heureusement, le mien ne l'est pas.
À votre avis, pourquoi les parents choisissent-ils l’école Ichthus pour leurs enfants?
J'enseigne la physique aux élèves de notre école Ichthus et je dirige deux clubs d'activités pour les élèves intéressés par la physique et les mathématiques. J'aime beaucoup enseigner aux enfants. J'aime créer l'esprit de découverte et partager leur enthousiasme. J'apprends également à voir le monde de leur point de vue. C'est ainsi que je deviens moi-même comme un enfant, comme nous le dit le Christ.
Les parents envoient leurs enfants à notre école pour de nombreuses raisons différentes, mais la motivation spirituelle est peut-être la première d’entre elles. En prêtant attention au monde intérieur des élèves et à leur croissance spirituelle, l’école peut aider les familles à construire une fondation pour que l'enfant puisse s'appuyer sur ces connaissances et cette expérience spirituelle dans les moments difficiles de l'âge adulte.
Mais aucune école ne peut remplacer la communication entre les enfants et leurs parents au sein de la famille. Dans le passé, les familles étaient autrefois plus unies, on était plus proche spirituellement. Aujourd'hui, les familles semblent plus fragmentées. Cependant, notre communauté et notre école font tout ce qu'elles peuvent pour permettre aux familles de donner une bonne éducation à leurs enfants.
Le Grand Carême est en cours. Que souhaitez-vous à nos lecteurs pour cette saison bénie ?
Le Carême est la saison de l'espoir. Comme le dit le père André Léméchonok, le Carême peut nous donner l'énergie nécessaire pour tenir durant de nombreux mois. J'espère que vous vivrez tous un Carême épanouissant qui vous amènera à partager la joie de la Résurrection du Christ.
L'objectif primordial de notre vie est d'assurer le salut de nos âmes. Nous pouvons faire des progrès impressionnants si nous apprenons à remarquer et à reconnaître nos fautes, à nous repentir et à demander à Dieu Son pardon et Son aide. Ainsi, nous pourrons tous devenir de meilleurs chrétiens et de meilleures personnes.